Accueil > Documents, publications > Une peinture de l’indicible
Par Henri Charras
Les œuvres présentées par J.M. Torque nous confirment l’engagement de ce peintre dans une réflexion intériorisée sur son propre acte de peindre, c’est à dire sur la relation entre l’artiste et le geste-signe (tel que l’a défini A. Artaud), sur la relation du geste avec l’espace et la matière.
Par voie de conséquence rien de plus naturel, pour cet artiste, que de s’isoler du monde des apparences, d’opposer une sorte d’imperméabilité quasi organique à l’intrusion de l’objet en tant qu’extérieur au sujet agissant, ou même de la forme comme faisant partie du domaine de perception.
Pour le spectateur les œuvres de J.M. Torque peuvent apparaître comme jaillies d’un élément difficilement identifiable "dont surgissent tous les éléments pour s’y dissoudre à nouveau", d’un élément "qui n’est ni quelque chose ni rien", ancré au plus profond de notre être et qui correspond sans doute à "la réalité plus vaste" et au "destin cosmique" chers à Edgar Poe.
Dialectique constante entre l’élan et la retenue, traversée de frémissements aigus, d’ondes crispantes, de bouffées et de courants qui semblent emporter au septième ciel, vers un soleil invisible et concret l’éternel Icare qui sommeille en nous.
Peinture qui, avec Gaston Bachelard, nous fait conclure que "l’instinct de vol est la trace d’un instinct de légèreté qui est l’un des sentiments les plus profonds de la vie".
1983 H.P. Charras